Tempête autour d'une émission de télé-réalité en AngleterreLONDRES (AFP) - Une émission de télé-réalité, accusée de racisme envers une actrice indienne, provoque une tempête en Angleterre, qui est remontée mercredi jusqu'au Premier ministre Tony Blair.
L'affaire oppose Shilpa Shetty, 31 ans, qui dans son pays a tourné une quarantaine de films, et quelques unes de ses co-locataires de "Celebrity Big Brother", l'émission de télé-réalité de Channel 4, regardée fiévreusement tous les soirs par des millions de téléspectateurs.
Dans cette émission, pour laquelle les neuf participants sont filmés dans un appartement 24 heures sur 24 avec pour seul objectif de faire éliminer les autres pour rester seul et gagner au final, l'ambiance n'est guère aimable.
Shilpa s'est ainsi vue tour à tour traiter de "chienne", de "c...e", son glamour, son accent, et son assurance sophistiquée ayant du mal à passer.
Certaines de ses co-locataires lui ont aussi reproché sa façon de cuisiner, lui ont demandé si elle "habitait dans une cabane", ou encore affirmé que si les Indiens étaient minces, c'est qu'ils étaient souvent malades, faute de cuire assez leurs aliments.
Les larmes et les déclarations de la jolie actrice, - "pourquoi me détestent-elles" - ont fait le reste, et provoqué la colère, dans une Angleterre où vivent des centaines de milliers de personnes d'origine indienne.
Mercredi soir, près de 20.000 "plaintes" dénonçant la façon dont elle est traitée depuis le début de la nouvelle série le 3 janvier, avaient été reçues via internet par l'Ofcom, l'autorité indépendante régulatrice des médias britanniques. Channel 4 en a reçu quelque 2.000 autres, et la police a même fait état de "menaces" contre certains participants de l'émission.
A la mi-journée, le Premier ministre Tony Blair s'est vu interpeller à la Chambre des Communes, où il a admis ne pas regarder l'émission, mais a pris soin d'affirmer son opposition au racisme "sous toutes ses formes".
Et à des milliers de kilomètres de là, le ministre des Finances Gordon Brown, en voyage pour la première fois en Inde où l'affaire fait grand bruit, a dénoncé "tout ce qui nuit" à l'image d'un Royaume-Uni "juste et tolérant".
Deux autres ministres britanniques se sont publiquement indignés, tout comme le maire de Londres Ken Livingstone, et mercredi soir l'affaire prenait une dimension diplomatique: à New Delhi, le sous-secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, Anand Sharma, a fait savoir que le gouvernement indien "étudierait tous les aspects" de cette affaire et "agirait de manière appropriée".
Channel 4, avait dès mardi fait savoir qu'elle prenait "extrêmement au sérieux", tout comme le producteur Endemol, "les questions d'abus racial". Mais la chaîne avait défendu un programme qui montre "l'interaction sociale" des participants.
Dans un communiqué diffusé mercredi soir, elle a affirmé qu'il n'y avait "pas eu d'injures ou de comportement racistes manifestes" visant Shilpa Shetty, précisant que les comportements racistes "sans ambiguïté" n'étaient pas tolérés dans l'émission. La chaîne a toutefois admis qu'il y avait "sans aucun doute un clash culturel et de classes entre elle et trois des filles britanniques."
Mercredi, elle pouvait, en dépit de la tempête en cours, se frotter les mains, de même que la jolie Shilpa, jusqu'alors quasi-inconnue en Angleterre.
Ces derniers jours, l'émission a gagné un million de téléspectateurs.
Et Shilpa est donnée désormais gagnante probable de l'émission par la maison de paris William Hill.